Discours impatients

Publié le par Lionel Droitecour

Maurits Cornelis Escher (1898-1972), Le second jour de la création, 1925

Maurits Cornelis Escher (1898-1972), Le second jour de la création, 1925

1.

Lorsque j’aurai conduit l’amour en ce matin,
Dès lors que ton chagrin, seul, peuplera ma tombe,
Où trépassent, lueurs, nos vaines effusions,
Quel sera mon viatique au risque du néant ?

J’aurais donné mon âme à ces vers aboutés,
Doutant de ma parole et de ce verbe étrange ;
Absurde en mon silence éclos sur du papier,
Aux boucles d’encre sèche ourlées, obstinément.

Et vous viendrez peut-être à moi avec dédain,
Vos lèvres dessinant le mépris à mon nom,
Contempteur d’un émoi blessant votre pudeur.

Je ne serais plus rien, passager de l’éther ;
Dilué dans l’essence où flambent des lumières
Sourire évaporé en la sente éternelle.

2.

Et m’en irai, changeant, dans l’onde universelle
Vague, dans l’air du soir où passent nos chimères,
Médiocre acmé de l’être, épuisé, délétère.

De crainte en espérance éconduit et songeur,
Je mènerai ma barque aux rives d’Achéron
En l’ultime seconde où mort est notre andain.

Je serai de ce chœur où bat le firmament
Dans l’occulte splendeur de l’aube, clair sentier,
Où s’inscrivent, effrois où l'ébauche s’effrange,
Maints discours impatients sur nos cœurs déboutés.

Affamés à jamais devant le sol béant,
Nous sommes ce désir assoiffé d’illusions,
Qui s’invente un destin, s’y enivre, y succombe,
Incomblé, impuissant, inquiet, incertain.

juillet 2007

Publié dans Spiritualité

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