Synchrotrons

Publié le par Lionel Droitecour

Synchrotrons

Ne sommes nous que trajectoires,
Particules élémentaires
Dans un grand accélérateur,
Fait pour découdre le social ?

Collusion d’un ordre primal,
Décérébré par un moteur,
Ainsi vont nos trames grégaires,
Aux collisions de nos mémoires.

À grand bruit, parcelles infimes,
Nos gerbes sont désintégrées,
Paroles nues dans l’artifice
D’un songe à peine à son ébauche.

Dans l’obscurité qui nous fauche,
En l’énergie du sacrifice,
Nos âmes vont, moires navrées
Au rendez-vous de nos déprimes.

Partout y sont mornes visages,
Yeux creux, cavés, cernés et hâves,
Figures de défigurés,
Tortus, rompus, cœurs et corps nus.

Tant de monde et tant d’inconnus,
En nos cités tant d’emmurés
Qui semblent s’extraire des caves,
D’un songe affreux tristes mirages.

Et tous ils vont à l’envolée,
À toute allure et sans regard,
Accablés dans l’évitement,
Pour se fondre dans le décor.

Pourvu qu’on se propulse encor,
Où la solitude nous ment,
Dans les arcanes du hasard
Travée insane et bariolée.

Gravitons, positrons, neutrons
Fusent et giguent nos fragments,
Interactions faibles ou fortes,
Chimère vague en notre tête.

Cette course est notre conquête,
Entropies de nos amours mortes,
N’y sommes nous que mouvements
Synchrones en nos synchrotrons ?

septembre 2012

Publié dans Citoyen

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