Sur l’écueil à venir
Il ne faut que s’ouvrir un peu plus dans le jour
Et ne rien regretter. À pertes et profits
Les maux, les déceptions, les lies de l’amertume.
Je garderai en moi les instants délicieux.
De ces rares bouquets fleuris dessous mes cieux
Je ferai le viatique où le bonheur s’exhume
Au moins jusqu’au derniers des ultimes défis,
Dans la lisière, au soir, où s’éteint le séjour.
Les sourires anciens de mes vieilles rumeurs,
Les sentes enfantines aux parfums de mûre,
Les abois des frayeurs dont on rit en tremblant
Et les douces langueurs des canicules rousses.
Les granits assoupis où moutonnent les mousses,
Les rus cabriolant dont on faisait semblant
De sauter les torrents au pays d’aventure,
Gamins joyeux, naïfs, bien innocents semeurs.
Les maussades remous de mon adolescence,
Le corps qui se révèle et le doute de soi,
Dans ces linéaments d’improbables recours
Le beau dans le réel entrevu d’effraction.
En ces jours bas, rétifs, solennelle faction,
L’attente inespérée des mortelles amours,
L’appel inabouti que notre âme perçoit,
Devant l’imperceptible écho d’une carence.
Et puis ces temps nouveaux que la tendresse habite,
Le désir, en ses mains, de brusquer l’avenir,
De bâtir une simple et même ritournelle
Dans l’aveu de deux cœurs librement assemblés.
Ainsi, dans la moisson aux promesses des blés,
Façonner le cocon de l’enfance éternelle
Et renaitre à la joie sur l’écueil à venir
Des prochaines clartés que son regard invite.
octobre 2015