Au seuil de ma prison

Publié le par Lionel Droitecour

"Promenade matinale", une aquarelle d'Albert Hartweg, détail

"Promenade matinale", une aquarelle d'Albert Hartweg, détail

Point de mots, ce matin, pour dégrossir ma peine,
Elle est là devant moi, comme un morceau de haine,
Moisissure pareille, en bloc, à un levain,
Enflure d’un chagrin, en moi, antique et vain.

Je retrouve toujours au matin cet écho,
C’est de verbe qu’ainsi, je paye mon écot,
Je chemine aux travées instantes du poème
À rechercher toujours une sente bohème.

De mes trames tracées je sais le dérisoire,
J’invite la marée de ma pâle mémoire
À battre ce rivage aux berges ressassées,
Algues brunes et vertes, formes entassées.

Dans ce fouillis, fatras, chaotiques allées
Où des possibles sont mes chances détalées,
Je vais et viens toujours au manque primordial,
En l’oblique, sans fin de ce malheur radial.

Écrite en mon destin depuis le point des jours
Ton absence en l’orée me retrouve toujours,
Et je lance à rebours une prochaine stance,
Redite, altération de ton équidistance.

Sur ton manque je vais en apposant mes pas,
Aux chemins intracés qui ne consolent pas,
Je fais ma randonnée aux lignes d’horizon,
Où tu m’intimes, libre, au seuil de ma prison.

septembre 2013