Pour nos ailes lisser
On ne sait pas que l’on varie
C’est le miroir qui nous l’apprend,
Au paradoxe qu’il nous tend
D’une âme, en l’être, en vain marrie.
Ce que je fus hier n’est plus,
Corps d’enfant puis corps de vieillard,
Et pourtant le même regard,
Le même cœur, les mêmes flux.
Rien en cela n’est continu,
Chaque cellule renouvelle
En notre intime citadelle
La vie en chaque nœud ténu.
On s’illusionne à demeurer,
Tout change en nous, autour de nous,
Bientôt nous sommes à genoux,
Et la mort vient nous apeurer.
À peine une humble rémanence
En cette chair qui nous contient,
D’Ariane l’improbable lien
Au dédale, sans permanence.
Écho qui raisonne et résonne,
Un murmure dans la nuit blême
En l’élan vague d’un poème,
Pour fuir le chant de Perséphone.
Aveugle la Parque en sourit,
Caron apprête la godille,
La camarde sa banderille,
Remords, où notre cœur pourrit.
Il n’est plus qu’à laisser glisser
La barque aux flots de l’Achéron,
Et d’une piécette acquérons
L’oubli, pour nos ailes lisser.
juin 2014