Métro

Publié le par Lionel Droitecour

... Dans ce monde poisseux, souterraine imposture / Où l’homme se déprend de l’humaine nature...

... Dans ce monde poisseux, souterraine imposture / Où l’homme se déprend de l’humaine nature...

La rame du métro souffle siffle, lamproie
Qui feule et se lamente, on dirait qu’elle broie
Quelque chose, devant, morne et vivante proie.

Brusquement emporté de station en station
Marchandise, floué, terne et sans émotion,
Le peuple de Paris fuit vers une illusion.

Dans ce flux continu chacun va se poussant,
Au long d’une coursive où l’on devient passant,
Sous la faïence blanche, blême, se pressant.

Jour après jour encore sur un sol gras de crasse
Toutes ces âmes nues deviennent une masse
Se frôlant en sa nasse, lasse, qui s’efface.

Solitude, la nuit, sous les néons blafards
Y traîne sa misère, à l’abri des regards,
Avachie sur les quais, malmenant les clochards.

Dans ce monde poisseux, souterraine imposture
Où l’homme se déprend de l’humaine nature,
L’espérance est en fuite, ainsi la chose impure.

avril 2006

Publié dans Sensation

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A
Belle description qui me rappelle mes deux années passées à Paris, où je me déplaçais souvent en métro ou RER, muni de mon précieux laisser-passer, la "Carte Orange" à l'époque... Prémonitoire ! :-)<br /> <br /> Ce qui m'avait le plus choqué au début, outre l'odeur particulière de l'air chaud et vicié, est le fait que presque tous les passagers évitaient de se regarder, chacun fixait un point devant lui ou un quelconque écrit, livre ou journal. (en 1980 point de smartphones ou autres tablettes !)<br /> <br /> Mais bien vite on apprend à se fondre dans la masse, à devenir un corps parmi d'autres, l'esprit absorbé dans sa lecture ou ses pensées, sans autre relation avec son entourage que quelques échanges de regards furtifs et la vue affligeante des énormes panneaux publicitaires qui tapissent les stations.<br /> <br /> Bienvenue dans la fourmilière humaine...
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