Tel l’obscur impétrant

Publié le par Lionel Droitecour

... Plusieurs strophes déjà sont carguées aux mâtures, / Le zéphyr fait danser tant drisses que voilure ...

... Plusieurs strophes déjà sont carguées aux mâtures, / Le zéphyr fait danser tant drisses que voilure ...

J’ai ouvert, au virtuel, mon dictionnaire de rimes,
Pour la bonne mesure, celui des synonymes,
Et par sécurité j’ai indexé le site
Où est conjugaison correctement décrite.

Je suis paré, c’est bon. Que faire ? Rêvassons.
Les mains sur le clavier je remâche des sons,
Je grommelle murmure, cherche une ouverture,
Concentre l’oripeau de mon doute immature.

Car ordinairement le premier vers survient,
Et par surprise il nait en moi comme il convient,
Armé, de pied en cap, en mon crâne obsidien,
Qui me surprend toujours en l’orbe quotidien.

À proprement parler je ne le cherche pas,
Il s’impose, il parait, il me trouve, compas,
Astrolabe aux marées qui battent mes pavois
M’emportant vers le large aux débours des émois.

Plusieurs strophes déjà sont carguées aux mâtures,
Le zéphyr fait danser tant drisses que voilures,
Que je ne sais encor si librement navigue
Ou contemple l’azur, affalé sur ma digue.

C’est voyage au long cours où le temps s’abolit,
Quand bien même la brise en mes vergues mollit,
Quand même à l’horizon le cap ou bien la rive
Ne sont que ce mirage où mon âme dérive.

Me voici tout soudain à contempler ce lot
De vers en moi natifs et, comme un camelot,
Je range à mon étal ma vaine cargaison,
Marchand, quatre saisons, de rimes, de raison.

Mais hélas nul chaland ne lèche ma vitrine
Et j’en suis pour mes frais à tenter ma comptine,
Seul devant mon clavier, comme l’algue à l’estran,
Desséché, oublié, tel l’obscur impétrant.

décembre 2013

Publié dans Marine

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