Bacchus

Publié le par Lionel Droitecour

Bacchus

Bacchus est un dieu morne à la pointe du jour ;
Sa lèvre enflée exhale une haleine mourante
Et ses tristes regards se posent alentour
Qui contemplent, hagards, une aube terrifiante,

Née de l'impure ivresse. Déchéance affalée
Aux lices d’un comptoir en vagues rectitudes
Où claquent les monnaies, sa lampée avalée
Y mouille et va moussant ses longues solitudes

En son échine molle... Puis, il bouge, carcasse
Ebranlée à regret pour affronter son sort
En s'appuyant aux murs où, cahotant, il passe.

Dérive surhumaine et désespoir sans nom,
C’est l’ivrogne qu'on raille, embué par la mort,
Et qui sent en sa chair languir un vieux démon.

octobre 1990

Publié dans Névrose

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I
Terrible poème et terrible regard... Ayant moi-même assisté aux ravages des vapeurs éthyliques sur feu mon paternel je sais à quel point ce peut être triste pour le concerné et oppressant pour l'entourage - particulièrement les enfants.<br /> J'en ai longtemps gardé une rancœur tenace envers tout disciple de Bacchus, maintenant apaisée, car je sais que chacun agit comme il peut avec ce qu'il a et que nul ne peut juger autrui sans &quot;avoir marché quelques kilomètres dans ses chaussures&quot; selon l'expression consacrée...
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I
Ce poème n'en prend que plus de force et de profondeur, j'attends avec impatience celui du 7 décembre...<br /> Les souffrances familiales restent en grande partie ancrées en nous, parfois de manière consciente, parfois non... Leur faire face et les surmonter me semble un acte essentiel dans notre chemin vers la libération - ou plus prosaïquement vers la compréhension et la sagesse !
L
Ce regard est hélas celui de mon second frère, décédé prématurément des suites de ses longues addictions.<br /> Je lui ai rendu hommage, au delà des souffrances communes, dans un poème intitulé « Au frère défunt » qui sera publié en ces pages le 7 décembre prochain.<br /> ( Si « over-blog » tient ses promesses )