Engeance courtisane
Un voyage de plus aux trames quotidiennes,
Trajet sans conséquence en ce morne séjour,
Prison du temps, meule grégaire, vaste pressoir
Où, de fruits sans passion, amers, nous nous changeons
En l’huile maculée de multiples rouages.
Elle n’est pour nos mains, l’essence créatrice,
Cet art du geste sûr dont l’aplomb nous libère,
Savoir faire en l’intime où le corps se transcende.
Un labeur continu ronge notre vigueur
En l’appel arrogant des soumissions vulgaires.
Plus de communauté, l’humain particulaire,
Travaillé par la force où le profit commande,
N’est plus qu’une fusion, quantique, dérisoire,
Où le sens s’abolit aux sentes du savoir.
Enfreindre est à ce compte notre seul recours,
Haro contre l’injuste insultant le devoir.
Un fascisme légal s’instille en le social,
Il dit le coût brutal au défaut du rapport
Vante la performance où s’inscrit le calcul :
Le monde s’enrichit en fabriquant des pauvres.
Le naufrage des gueux finance en banqueroute
Un rutilant cortège de maîtres bavards,
L’iniquité renait, tel un ancien régime
Chaque jour, à chaque heure en nos écrans tactiles.
Partout la vérité, comme fille des rues,
Est outragée, violée par des verbeux arguant
De la nécessité de leur modèle injuste
Pour lustrer l’idéal que l’on nomme Marché.
Et ce dieu sans projet si ce n’est que de prendre,
Trouve ses laudateurs à son morne banquet,
Philosophes d’un crime en la vaste sébile,
D’un libéral Tartuffe, engeance courtisane.
novembre 2014