Vieilles amours
1.
Parfois je me souviens la geste de mon père,
Habitudes, vêture et façon d’exister,
Tout ce qui, désormais, n’est plus qu’en ma mémoire.
Nous sommes ce murmure au bruit que fait l’histoire,
Sous de vastes renoms que l’on aime à citer,
Tels Augustes, ces rois, capitaines de guerre.
Ces savants, ces fameux, tous ceux du dictionnaire,
Qui furent destinées que le marbre excitait,
De leur vivant déjà, statufiés dans la gloire.
2.
Mais les humbles, les gueux, ceux qui sans fin peinaient
Aux chemins de traverse et dans l’obscurité,
Qui, sincères, marchaient, leur âme en bandoulière.
Ils ont moulu leur grain, peu à peu, sur la terre,
Ces petites amours en petite cité
Qui lentement, sans cesse ont poussé leurs années,
Chagrins après soucis au fil de leurs journées.
Ceux là, dont l’écheveau s’en va sans vanité
Ne sont que cendre, un peu, sous un peu de poussière.
3.
En l’écho suranné de leurs vieilles amours
S’inscrit la remembrance en un cœur assiégé,
Citadelle improbable emmurée dans des mots.
Ils creusent leurs fossés aux rives de l’ego,
Je suis, je fus, j’étais et l’on se sent piégé
Au dire qui nous porte et nous pousse toujours.
Hâbleur, dans l’argutie et la plainte des jours,
Quotidienne rumeur au paraître figé,
Antre à nos cœurs sans joie, dans l’espoir du repos.
décembre 2006