Au déchant des clairières

Publié le par Lionel Droitecour

Sur les rives du lac de Servières, Puy de Dôme, Photo LD

Sur les rives du lac de Servières, Puy de Dôme, Photo LD

Niché au cœur du monde, un petit coin de terre,
Clairière au sein d’un bois où la sente aboutit.
Là, un roc millénaire, un dolmen, et ma voix
Qui résonne en ce lieu parmi les solitudes.

Je viens chercher ici de calmes amplitudes,
Loin du chœur aberrant qui bée et se fourvoie,
D’un mensonge social où naufrage, engloutie,
L’espérance aveuglée d’un réel mercenaire.

Le dos contre le sol, pareil à un gisant,
Dans le souffle du vent une marée m’éveille,
Comme des océans rugit l’onde à nos bords.
Lors, quelque chose, en moi, se lève et se déploie.

Lentement, les yeux clos, j’écoute, à claire voie,
Cette immense rumeur dans les grands arbres tors,
Il me semble qu’un dieu murmure à mon oreille
En ma poitrine, ouvert, mon cœur va se grisant.

Humains, sommes innés du charroi de nature,
Et la continuité de l’âme à la matière,
Au pas de l’infini, une seule substance,
En la lumière noire où se meut notre élan.

Cette moire est en nous, comme un vaste relent,
Où, dans l’onde du jour est un soc d’espérance :
Dans le sein de la terre où l’argile est prière,
Nous en irons gésir ainsi que l’on s’épure.

Corde, peut-être, au sein de l’intime en sa forme,
Il demeure un écho, qui épuise nos corps,
De l’instant primordial où nous fûmes ce germe,
La stance du possible en l’éternel bruissant.

Sous le sceau de la mort en son râle, impuissant,
Je me soucie bien peu que la tombe m’enferme,
Je n’y veux point nourrir le dol de mes remords :
Que le doute, ici-bas, en ma tourbe s’endorme !

Je serai, quelque jour, roide dans ce limon,
Déshabillé de moi, rendu au minéral,
Et je saurai, alors la sagesse des pierres,
Ou, sur les frondaisons, la frise des nuées.

Je ressens cet appel des âmes dénuées,
Etendu dans le calme déchant des clairières,
Inerte, sur la terre où un rêve ancestral
Perdure sous la peau de mon vague sermon.

août 2012

Aria Cum dederit, extraite du psaume Nisi Dominus en sol mineur, RV 608 d'Antonio Vivaldi

Publié dans Spiritualité

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